La maladie toujours plus forte
Une fois encore, je me sens prise au piège dans cette spirale infernale qu’est cette maladie. J’ai cru pouvoir en sortir un peu, pendant quelques temps, en ayant quasiment plus de crises de boulimie. Juste très peu de compulsions, probablement entraîner par la faim et les restrictions imposées. C’était du moins ce que j’espérais…
Mais depuis deux jours, les crises ont recommencé. Me revoilà à vider un placard ou me jeter sur tout ce que je peux trouver de calorique ou sucré dans le frigo. Ces crises atroces qui ne s’arrêtent que lorsque mon estomac ne peut plus rien accepter.
Je m’étais pourtant juré de ne plus vomir. Cela m’était devenu un acte inacceptable et qui me faisait une peur terrible. Mais inévitablement, les crises de ces derniers jours m’y ont poussée à nouveau. Je ne peux mentalement accepter encore de garder ce que j’avale dans de tels épisodes. Alors je m’oblige à essayer d’en garder le moins possible.
Je suis lasse. Lasse de constater jour après jour que les choses ne semblent pas évoluer. Ou si peu ! Pourtant, j’ai la sensation d’avoir déjà fait un travail énorme, en collaboration avec le psy. Evolué sur plein de choses, compris bien des problèmes, fais le point sur des éléments de mon passé, ou du présent. Je sens pourtant tellement que j’ai évolué et réglé tant de choses.
Mais au niveau des symptômes de la maladie, rien ne semble vouloir bouger. Toujours autant de signes caractéristiques de l’anorexie, avec plus que jamais un désir de maigrir, ou du moins de ne surtout pas grossir à nouveau… Calcul encore des calories, en achetant même plus certains produits comme les cœurs de palmier par exemple que je trouve trop caloriques, ne me restreignant plus qu’aux endives (crues ou cuites), champignons et pommes. Pesée quotidienne à nouveau, pour être certaine que le chiffre n’augmente pas. Je me vois grosse, dans les miroirs, dans mes vêtements, dans l’image que j’ai de moi… Et puis ces troubles boulimiques qui persistent eux aussi. Une crise par jour en principe, sinon plus. Les vomissements qui s’en suivent… Et tous ce qui s’associe à tous ces maux. Les douleurs physiques et mentales qui en découlent.
Je suis certaine que si je m’amusais à lire ce que j’écrivais il y a un an, je retrouverais les mêmes textes, les mêmes maux, mêmes souffrances, mêmes symptômes…
Que faut-il en conclure ? Que le travail entrepris n’est pas efficace ? Que je ne fais pas suffisamment ce qu’il faut pour m’en sortir ? Que je ne le veux pas au fond de moi ? Et pourtant… J’ai tout fait, tout essayé depuis 2 ans. J’adhère à tout ce qui m’est proposé. J’ai accepté une thérapie auprès d’un psychiatre, j’ai essayé l’ostéopathie, je suis favorable à un traitement médical de soutien, je m’efforce de pratiquer l’auto-hypnose et la relaxation, je réponds aux travaux demandés par mon psy (du style faire une lettre intitulée « à ma mère », ou faire une liste des choses que j’aimerais voir changer en moi, écrire, réfléchir à telle ou telle chose chaque soir avant de m’endormir, regarder et analyser des DVD comme « le roi et l’oiseau », travailler sur l’imaginaire… et j’en passe). Je me suis inscrite cette année à des cours de danse, pour essayer progressivement d’accepter mon corps, de le développer et de développer surtout, une autre image de moi…
Je ne sais plus ce qu’il faudrait que je fasse. Vers quoi me tourner ? Quel sera le déclic ou l’élément déclencheur qui me permettra un jour de revivre normalement ?
Et si cela n’arrivait plus jamais ? Et si je devais me convaincre que ma vie sera désormais ainsi. Rythmée par cette alternance de troubles alimentaires, anorexie, boulimie, anorexie, boulimie, endives, orgie, endives, orgie…
Certaines personnes doivent vivre définitivement avec un trouble. Les diabétiques par exemple. Une personne de ma famille est atteinte de cette maladie. Cela fait maintenant plus de 10 ans qu’elle ne mange que des courgettes cuites à l’eau, quelques autres légumes et des produits bien spécifiques. Elle n’a pas le choix, et elle n’aura plus jamais la possibilité de manger à nouveau autrement. Peut-être en est-il de même pour ces pathologies ? Un dérèglement de l’organisme ou du mental qui fait qu’il n’y a pas de retour en arrière possible. Et qu’il faut par conséquent admettre, accepter, vivre avec ?
Je ne peux pourtant me résoudre à de telles pensées. J’ai l’impression que ce serait baisser les bras, et ne plus vouloir me battre. Cesser de chercher et de trouver LA SOLUTION.
Je ne sais plus. Une fois encore, je me retrouve dans une prise de tête, où tout se mélange, les questions se percutent les unes aux autres sans trouver leur réponse. Je me martyrise l’esprit comme j’ai si souvent l’habitude de le faire. Je ne peux m’empêcher de penser, essayer de comprendre, analyser. Tout le temps. Je ne laisse jamais mon mental se mettre au repos. Je ne sais pas ce que c’est de ne pas me poser de questions. Quelque soit la situation, ce que je fais, ce que je vis, ce que je vois, ce que j’entends… C’est épuisant à force. Un véritable flipper dans mon cerveau ! ! Cette boule qui n’arrête jamais, rebondit à droite, est renvoyée à gauche, percute des champignons, redescend puis est relancée, des cibles à atteindre, des scores à battre, des bourdonnements, du bruit, des lumières qui clignotent un peu partout ! J’aimerais parfois ne plus pouvoir penser, ni même réfléchir.